Caballeros del Apocalipsis

Caballeros del Apocalipsis

Mallorie Quertain


EUR 17,90

Format: 13,5 x 21,5 cm
Nombre de pages: 174
ISBN: 978-3-99146-133-3
Date de publication: 25.09.2023
C’est au cœur de l’univers des gangs latinos américains que nos personnages évoluent. Disparition, incendie, trahisons, vengeance, seul le véritable amour règnera en maître dans ce chaos. Nuire aux rêves d’un homme entraine sa rage la plus vive, peut-on simplement y échapper ?
La sombra con la luz


« L’obscurité ne peut pas chasser l’obscurité ;
seule la lumière le peut.
La haine ne peut pas chasser la haine ;
seul l’amour le peut. »
Martin Luther King (1929–1968)


« La oscuridad no puede ahuyentar la oscuridad ;
solo la luz puede.
El odio no puede ahuyentar el odio ;
solo el amor puede. »
Martin Luther King (1929–1968)


À toi mon unique amour car tu es et resteras
la seule lumière qui inonde
mon cœur et mon âme chaque jour.

A ti mi único amor porque eres y seguirás
la luz que inunda
mi corazón y mi alma todos los dias.



Le cavalier sur le cheval blanc


« J’ai vu, et regardez ! Un cheval blanc ; celui qui était assis dessus avait un arc et on lui a donné une couronne, et il est sorti en vainqueur pour mener à terme sa victoire. »
(Révélation 6:2)

Il ne me fallut que quelques minutes pour rassembler le peu d’effets personnels qui traînaient ici et là dans cette chambre que j’avais occupé depuis plus de quatre mois.
Aucune nostalgie ne m’envahissait à l’idée de la quitter. Maria arriva au moment où je tirais la fermeture éclair d’un sac de sport qu’elle m’avait prêté pour l’occasion.
– Tu n’as que ça ? s’étonnait-elle en attrapant le sac.
J’hochais la tête en guise d’affirmation. Ayant passé le plus clair de mon temps dans un sommeil artificiel, je n’avais porté pour ainsi dire que la tenue fournie par l’hôpital. Cette horreur de robe qu’on attache autour du cou après avoir enfilé les bras. Celle-là même qui, ouverte à l’arrière, offrait une vue de choix à tous les spectateurs intéressés par vos fesses.
Je m’arrêtais un instant devant la fenêtre, l’unique vue que j’avais sur l’extérieur depuis des semaines.
– Tu angoisses ? m’interrogeât Maria de sa voix douce et calme.
– Non, lui assurais-je faussement.
– C’est normal tu sais, ça fait des mois…
Je lui coupais la parole en attrapant à la volée le tas de documents renseignant mes divers rendez-vous remis par l’infirmière le matin même de mon départ.
– La seule chose qui m’angoisse c’est le procès de cet après-midi, essayais-je de nous convaincre mutuellement.
Affronter à nouveau le monde extérieur, le regard des autres, probablement un jugement quelconque me stressait. J’avais pourtant évoqué à de nombreuses reprises cette difficulté avec ma psy commise d’office et tentais de surmonter l’épreuve en camouflant mes émotions.
Mes mains tremblantes laissèrent échapper une ordonnance reçue. Je me penchais pour la ramasser mais mon amie me précéda.
– Ça va tu sais, je ne suis pas si grosse, je peux encore me baisser.
Nous éclations de rire, enceinte de presque sept mois, je n’avais pris que quatre malheureux kilos.
Nourrie pendant ce qui me semblait une éternité par baxter, je devais à présent combattre un réel dégoût de la nourriture.
Elle me tendit l’ordonnance après y avoir jeté un bref regard.
– Ils te donnent des antidépresseurs ?
Honteuse, je lui arrachais le papier des mains.
– Je ne suis qu’une suicidée, tu as oublié ? C’est le protocole, soupirais-je.
Ce n’était ni ma profession, ni les circonstances de l’acte qui pouvaient interférer dans leur règlement. Ces étiquettes qu’on vous colle si docilement, sans espérer rencontrer un éventuel mouton qui égaré du troupeau, se serait mis à réfléchir par lui-même et y aurait vu un acte de survie plutôt qu’un acte de détresse.
Nous quittions la chambre sans lui accorder la moindre dernière attention.
Les couloirs nous séparant du parking me semblaient interminables. Je dû m’arrêter à deux reprises pour reprendre mon souffle.
Je m’excusais auprès de mon amie, incriminant la fonte musculaire octroyée par mon alitement forcé. Mais je n’étais pas dupe, l’agoraphobie à laquelle je me préparais depuis l’annonce de la date de sortie ne faisait attendre, comme une vieille amie d’enfance qui s’invitait sans cri égard me réclamant des comptes après l’avoir oublié au fond d’un placard durant de longues années.
Je restais silencieuse sur le chemin qui me ramenait chez Santina. Ouvrant et refermant la vitre pour inhaler une bouffée d’air à quelques reprises, je priais que la route soit dégagée.
– Pourvu qu’il n’y ait d’embouteillages… pensais-je à voix haute.
Le soleil brûlant inondait l’habitacle de la voiture et le peu d’oxygène que j’arrivais à puiser de l’extérieur accentuait l’atmosphère étouffante du trajet.
– Tu es pressée de rentrée ? m’interrogeait mon amie avec douceur.
– C’est normal, non ? lui rétorquais-je.
Je me rendis compte du caractère glacial de ma réponse lorsque j’entrevis du coin de l’œil son regard craintif se poser sur moi.
– Excuse-moi, j’angoisse un peu, camouflais-je de peur de déclencher une crise de claustrophobie sous les yeux de mon amie qui ne pourrait comprendre le mal qui se rabattait sur moi.
Une enfance difficile m’avait affublé de cette tare que je pensais surmontée depuis longtemps. Quelques minuscules symptômes ressurgissaient par moment. En période d’examens à l’université par exemple. Je les attribuais à une perte de contrôle face à une période stressante et de toute évidence, la situation que je vivais m’échappait complètement.
Santina avait pourtant pris de mes nouvelles régulièrement par téléphone et semblait si heureuse à l’idée de mon retour, je ne comprenais pas pourquoi cette boule à l’estomac ne me quittait pas.
Je fixais ma montre. Il était presque quatorze heures et le procès de Toni débutait dans moins d’une heure.
C’est la seule chose qui avait motivé mon départ de l’hôpital, malgré les vaines tentatives de ma psychanalyste de m’en dissuader.
« Pas prête », me répétait-elle sans cesse.
Depuis l’épisode d’Hector et tout ce qui c’était passé chez lui, je me réveillais en pleine nuit. Des terreurs nocturnes s’étaient immiscées dans ma routine quotidienne.
Le manque de sommeil réparateur m’affaiblissait chaque jour un peu plus. Emprise à de fortes chutes de tension, je devais protéger ma fille d’une éventuelle chute.
Il était également impératif de différencier mon hypotension des malaises vagaux qui survenaient à chaque fois qu’une personne me touchait. Tout aussi invalidants, ils ne brouillaient ni ma vue et ne me provoquaient aucun bourdonnement d’oreille. Le risque de chute, pourtant moindre, restait présent face aux vertiges.
Bien que physiquement je paraissais relativement en bonne santé, je culpabilisais de l’altération de mon état psychique.
« Rien ne doit paraître aux yeux des autres… Tu es forte, bien plus forte que la somme de toutes tes peurs… » me répétais-je en boucle pour m’octroyer du courage. Mais selon ma thérapeute je ne faisais que porter un masque ne solutionnant vraisemblablement le problème.
« Tant que tout passe inaperçu, je suis sauvée », lui soutenais-je convaincue.

J’enfouissais un calmant discrètement sous ma langue, essayant de me relaxer un tant soit peu sur le chemin qui nous restait à parcourir.
Nous arrivions enfin.
– Je me change en vitesse et on repart, avertissais-je Maria.
Santina se levait de son fauteuil à notre entrée. Elle ne pouvait contenir ses larmes en me serrant dans ses bras.
Je ne ressenti aucune sensation désagréable, mais dû toute fois écourter l’instant.
– On doit filer, je ne veux pas être en retard, insistais-je auprès d’elle, l’embrassant sur le front comme Toni en avait si souvent l’habitude.
Je grimpais à l’étage quatre à quatre, attrapant au passage de quoi me vêtir plus décemment.
Un petit tour devant le miroir de la salle de bain, un maquillage rapide histoire de me sentir moins malade et je redescendais aussi vite.
– Tu es sûre que tu ne veux pas que je t’accompagne ? me demandait Maria sur le trajet du tribunal.
– Ça va aller, la remerciais-je en souriant.
Je m’étais si souvent préparée au pire que je me sentais capable d’encaisser.
Je fixais à nouveau ma montre. Maria était stationnée sur le parking depuis quelques minutes et je pris une grande inspiration avant de descendre du véhicule.
Je la pris dans mes bras, l’étreignant à l’extrême.
– Courage ma belle, je t’attendrai le temps qu’il faut, me réconfortait-elle.
– Merci, lui chuchotais-je, la gorge serrée.
Un courant d’air glacial me transperça au passage du portique de sécurité. Mon corps entier vibrait, hérissant au passage chaque poil de ma peau.
J’arrivais à frissonner par plus de quarante degrés Celsius de température extérieure ressentie.
Hormis les deux gardes de l’entrée, je ne croisais que quelques avocats pressés, chargés de piles de dossiers sous les bras.
Je me dirigeais vers l’accueil, dans l’espoir de ne pas me perdre dans cette immense bâtisse.
Une secrétaire souriante m’indiqua le numéro d’une salle à l’étage.
Je m’aventurais doucement, grimpant marche par marche d’un large escalier en marbre, domptant ma respiration afin de n’éprouver aucun vertige.
Un jeune homme vêtu d’une toge noire s’arrêta à ma hauteur.
Il fixa mon ventre.
– Ça va Madame ? Je peux vous aider ?
Je refusais poliment mais il insista pour me conduire jusqu’à la salle.
Le nom de Toni figurait sur un tableau à l’entrée. Le jeune homme m’abandonna face à une porte en bois vernie déjà fermée. Pourvu que je ne sois pas en retard, songeais-je craintivement.
Je remerciais l’homme pour sa gentillesse. Il me sourit timidement en regardant le panneau.
– La peine de mort pour ce genre d’individu, j’ai étudié le dossier, me dit-il en tapotant le nom de Toni du revers de la main.
Je me pétrifiais à entendre ces mots. Je m’étais préparée à tout mais pas à ça.
– Je n’ai pas entendu que cette peine était d’application ici, gloussais-je.
– Elle devrait, termina-t-il en retournant sur ses pas.
Je regardais mon portable, l’envie de demander à Maria de me rejoindre m’envahit.
La porte s’ouvrit doucement et une dame en sorti une tasse de café à la main.
Elle me tint la porte avant que celle-ci ne se referme. Je m’engouffrais, rangeant mon téléphone dans mon sac.
Un silence de mort régnait dans cette salle où les chaises y étaient disposées de chaque côté d’une allée centrale, comme elles le seraient dans une église.
Je prenais place à gauche de l’allée. Me rapprocher le plus possible de la barrière en bois me séparant de la place qu’il occuperait ne m’était pas difficile.
J’étais pour ainsi dire la seule personne du côté de la défense.
Je sentais de nombreux yeux posés sur moi en provenance de l’accusation. Leurs murmures diffus bourdonnaient brisant le calme et l’espace vaste de l’amphithéâtre. Je fouillais mon sac à la recherche d’une bouteille d’eau. Quelques gorgées m’aidant à hydrater ma gorge asséchée m’empêchaient souvent d’hyperventiler.
Une porte s’ouvrit dans le fond gauche de la salle, captant tous les regards et restaurant le silence de départ.
Toni arrivait, menotté et accompagné de deux gardiens. S’il n’avait pas porté la tenue orange que je lui connaissais lors de ma visite au pénitencier, je ne l’aurais probablement pas reconnu. Il s’avançait lentement, les cheveux lâchés, lui couvrant la moitié du visage, ses traits tirés et presque aussi pâle que moi.
Il avait de toute évidence perdu pas mal de poids et de masse musculaire.
Je ne pus m’empêcher de couvrir ma bouche à cette vision d’horreur.
Il leva les yeux dans ma direction, je ne pus dissocier ses pupilles de ses iris. Deux morceaux de charbon sans aucune expression me fixaient vaguement.
Je me mis nerveusement à mordiller l’ongle de mon pouce.
Il prit place à côté de son avocat, me tournant le dos.
Que ce soit de notre côté ou de l’autre, nous n’entendions qu’un bruit de feuilles qui se tournaient et se retournaient sans cesse.
Toni se penchât vers son avocat, lui murmurant quelque chose qui lui fit lever les yeux de son dossier qui semblait capter toute son attention.
L’homme d’une soixantaine d’années grisonnant se retourna furtivement vers moi.
Je m’attendais à un échange de parole mais il se leva brusquement à l’arrivée du magistrat.
Toute l’assemblée, y compris moi, emboîtions son geste.
Il prit place et nous permis de nous rasseoir.
L’accusation, d’une voix mielleuse, salua hypocritement le juge en question.
Ce dernier s’empressa de lui demander l’énoncé des chefs d’accusation.
Comme pressé par le temps et semblant n’y porter aucun intérêt, il écouta l’avocat de la partie adverse.
Celui-ci commença :
– Meurtre, premier degré ; Tentative d’homicide volontaire sur la personne d’Hector Cruz ; Voie de fait graves avec récidive ; Agression armée entraînant des lésions corporelles ; Trafic de drogue ; Infractions liées aux armes ; Possession de drogue.

Je pensais qu’il n’allait jamais s’arrêter. Je soupirais, inquiète.
Le magistrat semblait absorbé par le dossier.
Il leva la tête en direction de la défense.
– Que plaide l’accusé ? grogna-t-il en glissant ses lunettes sur son nez.
– Coupable votre honneur, répondit l’avocat de Toni sans prendre la peine de se lever de sa chaise.
Je restais abasourdie. Il n’allait pas se battre, il acceptait la sentence sans broncher, sans même essayer de se défendre. Il n’était de toute évidence plus l’homme que j’avais connu. Il ne restait que l’ombre de lui-même.
Je pestais sur ma chaise, lui et ses belles paroles à notre rencontre, me reprochant de ne m’être jamais battue pour personne. S’il ne le faisait pas pour son amour propre, qu’il le fasse pour sa fille !
– Au vu du dossier qui m’a été remis par les deux parties et de la récidive prouvée aux voies de fait, aucune clémence ne sera accordée par la cour, se prononça le magistrat d’une voix très calme.
Il invita l’entièreté de la salle à se lever. Je sentais mes jambes trembler.
– Monsieur Rivera, comprenez-vous les chefs d’accusation qui vous sont imputés ? ajouta-t-il fermement.
Toni acquiesça.
– La cour vous condamne donc à trente ans ferme. Vous pouvez emmener l’accusé.
Son marteau de bois fracassa la pesanteur de la pièce, raisonnant dans ma tête comme une balle qui m’aurait traversé, mettant un terme à mon insignifiante vie. J’en aurais été presque soulagée. Abrégeant sur le champ mes souffrances d’imaginer toute une vie séparée de l’homme que j’aimais.
Les gardiens emmenèrent Toni. Je me rassis, attendant au moins un regard de sa part qui m’aurait aidé à comprendre sa décision.
Il n’en fit rien, il disparut sans se retourner.
Je regardais la partie adverse se congratuler. Furieuse et triste à la fois, je me levais dépitée.
Son avocat s’approcha de moi.
– Pourriez-vous m’accorder un instant ? me demanda-t-il poliment.
Interloquée, je le suivi silencieuse.
Nous quittions la salle et nous nous enfoncions un peu plus dans le couloir. Galant, il m’ouvrit la porte, m’invitant à entrer dans son bureau.
Il me tira une chaise, mais je restais debout, sur la défensive.
Je sentais l’homme déstabilisé par mon attitude.
Il me tendit une enveloppe.
– Sur la demande de mon client, je vous remets ceci. Pourriez-vous, s’il vous plaît, me signer la réception…
J’ouvrais l’enveloppe remplie de billets. Ne le laissant poursuivre, je saisis la liasse.
– Je peux savoir ce que ça signifie ? lui demandais-je prête à lui faire bouffer billet par billet.
– Monsieur Rivera tient à subvenir à vos besoins, ainsi qu’à ceux de votre enfant.
Je balançais l’entièreté de l’enveloppe sur son bureau.
– Dites à Monsieur Rivera que sa fille a besoin d’un père et non de son fric ! Je me mis à trépigner en riant nerveusement.
L’homme me fixait, bouche bée.
Me dirigeant vers la sortie, je me retournais, achevant cet abruti incompétent de la dernière dose de venin qu’il me restait.
– Qu’il utilise son argent pour se payer un meilleur avocat !
Des larmes de rage me coulaient sur les joues. D’un pas décidé, poussée par l’adrénaline je m’encourais, reprenant le long couloir dans le sens inverse.

Mon empressement me fit entrer en collision frontale avec un homme de petite taille et assez trapu. Le choc fut assez violent pour me faire reculer d’un pas.
– Pardon Monsieur, m’excusais-je de mon inadvertance.
J’essuyais mes larmes du revers de la main. Elles étaient très probablement la cause de mon aveuglement et de cet incident malheureux.
– Ce n’est rien, Docteur. J’étais entre bonne main si vous m’aviez blessé, me déclarait ma malheureuse victime en souriant.
Je le fixais, interrogative. Il y avait des mois que personne ne m’avait appelé par mon titre.
J’essayais discrètement de me remémorer un éventuel contexte de rencontre. Son habit cérémonial de juge me fit douter.
– Ça ne va pas, Docteur ? s’inquiétait-il en me voyant pleurer. Venez donc prendre un café.
Nous entrions dans un bureau nettement plus spacieux que celui de l’avocat.
– Vous ne me remettez pas, n’est-ce pas ?
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