Recuerdo del Infierno

Recuerdo del Infierno

Thomas Rivera


EUR 21,90

Format: 13,5 x 21,5
Nombre de pages: 386
ISBN: 978-3-99146-653-6
Date de publication: 01.03.2024
Éliminer le bras droit d’un baron de la drogue, dire au cartel qu’on n’a pas eu le choix, que de mauvaises idées. Direction le Mexique où l’équipe devra tout tenter pour réparer les dégâts engendrés. L’héroïne débute son combat, le plus terrible de tous.
De retour chez Emilio, dans cette minuscule garçonnière attitrée à son trafic en tout genre, Toni s’écroula dans le sofa.
— Je fais un saut à la pharmacie, m’empressais-je de revêtir cette tenue de camouflage qui ne m’avait pas manqué.
Replaçant mes cheveux à l’intérieur de la capuche afin de dissimuler chaque mèches rousses rebelles, je l’entendais contester. J’attrapais son portefeuille et en retirais un peu de liquidité.
— Je fonce et je reviens, l’embrassais-je furtivement.
Il me fallait du matériel afin de le remettre sur pied ; entre les plaies, les ecchymoses et la douleur qu’il devait endurer silencieusement, j’avais du pain sur la planche.
Je m’arrêtais à la première boutique que je rencontrais. Vu le quartier où nous nous étions retirés, je ne dû marcher que quelques minutes. Il devait certainement y avoir plus d’échoppes de ce genre que de banques étant donné la nature de la population environnante.
Un coup de feu me fit sursauter en poussant la porte de ce qui ressemblait plus à un bistrot vandalisé qu’à une pharmacie. D’épaisses plaques de bois étaient accolées tant à la vitrine que sur chaque ouverture semblant maintenir les vitrages déjà brisés à multiples reprises. Une réparation de fortune censée tenir à l’écart les malfrats qui, de toute évidence, ne servait à grand-chose.
Je dévalisais les rayons à toute vitesse. Compresses, désinfectant, pommade anti inflammatoire s’amoncelaient au creux de mes bras. Je revisualisais l’état de mon homme dans ma mémoire afin de ne rien oublier. J’achetais une boîte de sutures adhésives par précaution. Malgré le monde qui affluait vers le comptoir de paiement, je me sentais si à l’aise que j’aurais très bien pu ôter mon sweat et découvrir ma tête. C’était un privilège qu’octroyait cet endroit, personne n’osait se regarder, se saluer ou même se frôler.
J’attendais mon tour en repensant à mon premier jour en taule. Fixer le sol en évitant de croiser le regard de qui que ce soit, cette règle entre ces murs devait également être d’application dans ce coin malfamé. Je déposais mes achats devant l’employée, essayant de lui échanger un sourire machinal. À sa façon de me regarder je compris que mon geste sortait de son habitude.
— Auriez-vous un kit de suture, s’il vous plaît ? préparais-je mon argent pour payer.
— C’est réservé au personnel médical, continuait-elle à pointer mes articles.
— Je suis médecin.
Elle leva les yeux vers moi. Je la sentais m’analyser, ou du moins anatomiser mon physique pour être sûre qu’il collait avec l’emploi.
— J’ai besoin de votre pièce d’identité.
— Je ne l’ai pas sur moi, baissais-je les yeux.
J’oubliais un instant que les derniers mois de ma vie avaient fait de moi une criminelle fugitive et avaient définitivement tiré un trait sur ma renommée et ma carrière.
— Un numéro d’accréditation ? tentait-elle de m’aider malgré tout.
— Laissez tomber, hochais-je la tête.
Prendre le risque de lui donner et attirer l’attention sur mon identité était trop dangereux. Je réglais mes achats.
— Un instant je vous prie, disparaissait-elle à l’arrière de son comptoir.
Elle revint quelques secondes plus tard avec une boîte stérile recouverte d’un film transparent. Elle me la tendit en me rendant mon esquisse faciale de départ.
— Ça arrive d’oublier ses papiers, me remettait-elle une aiguille courbée et du fil de suture résorbable.
Un frisson me parcouru tel un courant électrique.
— Merci, soupirais-je reconnaissante à son geste de compassion.
Je rentrais quatre à quatre retrouver Toni, outre passant les bruits de moteurs vrombissants, les cris de pneus patinant sur le macadam brûlant et y laissant probablement des trainées noires de caoutchouc fondu et le tapage de divers gangs se déclarant la guerre entre eux. Si un jour on m’avait annoncé que ma vie ressemblerait à une série policière du petit écran, j’aurais certainement ri aux larmes.
— C’est un flingue qu’il me faut pour traverser la rue et non un gilet à capuche, déclarais-je en franchissant le pallier.
Je jetais mes achats sur le fauteuil à côté de lui.
— À quoi bon si tu ne sais pas t’en servir, me répondait-il d’un ton paternel.
— J’apprends vite.
Je lui bondissais dessus.
— Montre-moi ça, auscultais-je soigneusement son arcade sourcilière explosée.
Ma position le laissait pressentir un autre genre de divertissement que déjà il saisissait mes hanches entre ses mains.
— Reste tranquille, l’embrassais-je en me relevant.
Je fouillais les armoires du coin cuisine à la recherche d’un analgésique de grande efficacité.
— Tiens, lui tendais-je une bouteille d’alcool entamée.
L’odeur rappelait celle d’une téquila bon marché mais l’absence d’étiquette sur le flacon ne pouvait le confirmer. Il en avala une gorgée.
— C’est si mauvais que ça ? riais-je en le voyant grimacer.
Je déballais mon kit.
— Bois ! Tu as besoin de sutures et je n’ai aucun anesthésique.
Je me préparais à pratiquer un acte de boucherie, occultant les mesures d’hygiène, de stérilité et de prévention de la douleur.
— Le tiers monde ! soupirais-je dépitée.
— Attend ! m’empêchait-il de commencer.
Sur mes genoux, ses jambes entre mes cuisses afin de bien visualiser la plaie, je me rasseyais un moment.
— J’ai eu Javier au téléphone. Il est en déplacement ce soir mais on peut récupérer Mia dès demain matin.
Je jubilais à l’excellente nouvelle qu’il venait de m’annoncer, me faisant presque oublier les conditions médiocres dans lesquelles il m’obligeait à travailler. Je lui sautais au cou. C’était presque trop beau pour être vrai et cette pensée déboula dans mon esprit à la vitesse et la puissance d’une avalanche.
— Il est où le hic ? me ravisais-je en contenant mon euphorie.
Il secoua la tête.
— Il n’y en a pas. Il semblait courtois en nous présentant ses condoléances pour Maria et Miguel.
Je me redressais à nouveau et enfonçais l’aiguille dans sa chair.
— Quel roc ! pensais-je admirative en ne le sentant tressaillir d’un poil.
Il avala une autre rasade de ce breuvage immonde.
— Bien sûr, il déplore le décès d’Hector.
Il prenait un ton tout aussi pompeux que si Javier avait lui-même prononcé ces mots.
— Il peut déplorer tout ce qu’il veut, j’en ai rien à foutre tant qu’il me rend ma fille !
Je terminais en sectionnant le fil à l’aide d’un couteau de cuisine à moitié rouillé.
— Tu as fini ?
Je grimaçais en fronçant le nez. Pas du tout satisfaite de mon travail, je balançais le couteau sur la table basse.
— Ça devrait aller si tu ne chope pas le tétanos.
Il me rappela l’épisode du tremblement de terre en brandissant la cicatrice de sa main.
— J’ai eu mon rappel de vaccin ce jour-là !
— C’est vrai, m’en souvenais-je.
Je me relevais pour évacuer mes déchets.
— Tu devrais aller prendre une douche que je puisse évaluer les autres plaies et te mettre de la pommade antidouleur.
Il disparût docilement dans la salle de bain. Il se faisait tard et une sensation de faim commençait s’installer. J’ouvrais instinctivement le réfrigérateur. Mise à part quelques bouteilles de bières éparpillées, rien n’était susceptible de calmer ma fringale. Je cherchais sur le net avec mon smartphone un service de livraison à domicile.
— Tu as le choix entre chinois, mexicain ou une pizza, lui demandais-je son avis en ouvrant la porte de la pièce d’eau, les yeux rivés sur mon portable.
Un nuage de buée s’engouffra dans les restes du studio.
— Tu comptes te laver tout habillé ? le voyais-je poirotant en regardant des litres d’eau s’évacuer sans qu’il ne soit dessous.
— Je pensais que tu allais m’accompagner.
Je fronçais les sourcils.
— Tu devais vérifier les autres blessures, me manipulait-il d’un ton mielleux.
Je me flanquais à rire.
— Commence, j’arrive. Je vais commander à bouffer.
— Non, toi d’abord ! m’ouvrait-il la cloison en verre de la cabine de douche.
Un sourire narquois se dessinait sur son visage.
— Tu me fais une crise d’enfant capricieux ?
J’abdiquais en cédant à sa requête. Le regard à la limite de la perversité, il s’appuya contre la porte, bras croisés et une jambe fléchie collant la semelle de sa chaussure dans le même alignement. Il s’amusait d’avoir gagné la partie, affichant un faciès moqueur. Derrière des iris brillantes d’une lueur qui ne m’était pas inconnue, il caressa sa barbe mal rasée.
— Tu es malaisant à me dévisager comme ça, commençais-je à me déshabiller.
Je filais sous le jet d’eau, devinant sans trop de difficultés ses obscurs desseins.
— Tu es content ? le sentais-je s’approcher dangereusement.
Lui tourner le dos m’octroyais une forme de revendication à son caprice salace.
— Et moi qui mourait de faim, râlais-je faussement.
Ses doigts s’immiscèrent dans mes cheveux, remontant du bas de ma nuque jusqu’au sommet de mon crâne. Il me poussa contre la paroi du fond, me faisant presque quitter le flux brulant qui se déversait sur mon corps dénudé. J’apposais la paume de mes mains de chaque côté de mon visage, un réflexe tentant tant à éviter le choc du plastique froid du revêtement qu’à retenir le poids de son corps. Sa bouche effleura mon épaule un bref instant, le temps de sentir ses dents s’enfoncer délicatement dans ma chair.
— Tu vas souffrir, anticipais-je en songe.
Bloquée dans sa prise, je gardais cette position me forçant presque à subir une fouille corporelle complète. Ses mains remontèrent de mon ventre jusqu’à attraper mes seins qu’il serrait à l’instar de deux fruits mûrs, cherchant à en extraire le jus. Entre caresse et douleur, il me faisait découvrir l’étendue de son excitation sur la peau de mes fesses.
— Tourne toi, me susurrait-il au creux de l’oreille.
Je m’exécutais, succombant au désir qu’il me provoquait.
— Tu es incorrigible !
Ses bras musclés m’encerclèrent complètement et je me suspendais à son cou. Attirée comme un aimant vers sa bouche, j’en oubliais les torrents se déversant sur nos deux visages. Entre sa salive et les gouttes nous éclaboussant, il dévorait ma langue.
— C’est toi que je vais corriger, me promettait-il d’allier luxure et romantisme.
Il attrapa mon cou d’une seule de ses mains, tandis que l’autre soulevait ma cuisse en la faisant glisser sur sa hanche. Il me tira violemment vers lui et se frotta entre mes jambes tel un animal en rut. Je me cabrais et l’accompagnais dans son mouvement. Très vite, dominée par mes pulsions, je le suppliais d’éteindre le feu qui consumait mon bas ventre.
— Tu n’as plus faim on dirait, se moquait-il de mon ardeur.
— Ho si ! aidais-je son sexe à prendre place au fond de moi.
Il souleva mes fesses, m’empalant définitivement sur l’objet de ma convoitise. Je laissais échapper un gémissement plaintif. M’aidant tant de mes bras enlacés autour de ses épaules que de mes cuisses cramponnées à ses hanches, je me laissais balancer au rythme de ses coups de rein. Ses doigts se resserrant sur le bas de mon dos augmentaient la puissance avec laquelle il me pénétrait. Je gémissais à en perdre haleine.
— Je vais jouir ! le prévenais-je de mon orgasme imminent.
Il ne devait pas en être très loin non plus, le sentant presque convulser en moi. Il nous était impossible de reprendre notre souffle et néanmoins, aucun d’entre nous ne se voyais ralentir aux portes de l’extase. Nous explosion tous deux dans un tourbillon de plaisir simultané. Nous accordions à l’unisson ce cri de lamentation qui accompagna notre jouissance. Je me laissais glisser le long de son corps, le sentant doucement quitter le mien.
— Tu ne devais pas vérifier mes contusions ?
Je quittais la pièce, attrapant une serviette au vol. Mes jambes tremblaient autant que lorsque des années plus tôt je terminais une séance de sport intensive.
— Tu es guéris ! dissimulais-je une certaine forme d’admiration quant à sa performance.
J’eus quand même droit à ma pizza et une bouteille de vin à laquelle nous jetions un ultime sort. Malgré qu’il essaya de réitérer son exploit avant de dormir, je m’écroulais de sommeil au bout de quelques minutes, assommée par l’alcool et la fatigue accumulée.
Le lendemain matin, je me levais la première et fouillais la cuisine à la recherche de ce qui pouvait ressembler à du café de près ou de loin. Je tombais sur un bocal de café soluble. Transformé en bloc après probablement un long séjour enfermé dans le garde-manger, j’en grattais la surface avec une cuillère quand Toni daigna quitter le lit.
— Qu’est-ce que tu fabriques ? me regardait-il m’énerver.
Il m’embrassa sur la tempe.
— J’essaie de nous faire du café !
N’y arrivant, je balançais ce maudit bocal dans l’évier. Même le choc n’émoustilla aucunement son contenu.
— Tu es stressée de retrouver Mia ? s’inquiétait-il de ma nervosité.
Je reprenais le flacon, m’évertuant à nouveau à essayer de décomposer ce caillou de caféine nécessaire à mon équilibre mental.
— Non, je suis stressée à l’idée de ne pas la retrouver justement.
Il m’arracha mon casse-tête des mains et ouvrit le robinet. Recouvrant le café d’une certaine quantité d’eau, il secoua énergiquement le bocal recapuchonné. J’en versais le contenu dans une tasse et le réchauffais au micro-onde. Je grimaçais à la première gorgée.
— C’est comment ? se flanquait-il à rire.
Je le renversais dans l’évier.
— Infecte !
— Viens ici, me prenait-il dans ses bras.
Je l’enlaçais collant de sueur. La température extérieure devait déjà frôler la canicule dès le lever du soleil et ce petit studio non aéré nous cuisait littéralement à petit feu. N’ayant l’esprit à ça, j’évitais de lui proposer de nouveau une douche.
— Si tu allais te préparer et que nous allions la chercher, on pourrait ensuite…
Il stoppa net.
— Se balader ? poursuivais-je sa phrase.
Il ne répondait pas, se rendant probablement compte de la bêtise qu’il s’apprêtait à dire.
— Tu oublies que je suis une fugitive sans papiers, soupirais-je dépitée.
— Ça va aller, un jour à la fois, me réconfortait-il.
Sans rien avaler, nous prenions la direction de la marina. Reprendre la voiture de Maria me rendit nostalgique, me remémorant nos sorties, nos fous rires et nos cachoteries entre filles.
Saviez-vous que le nerf olfactif était celui qui possédait la plus grande mémoire cellulaire ? Il nous suffit d’un seul et unique contact pour en garder un souvenir à vie. Me retrouver là, submergée de son odeur encore présente me bouleversait émotionnellement. Le trajet me parut moins long que la dernière fois.
— Je suppose que te demander de te taire… ?
Je fronçais les sourcils sans répondre.
— Oublie ça, en concluait-il à mon mutisme et mon langage corporel.
Je ne pus m’empêcher de pouffer. Javier nous reçut sans tarder.
— Toni ! Viens, je t’attendais.
Une impression de déjà-vu désagréable titillait mon intuition.
— Puis-je vous servir quelque chose à boire ? Je me suis rendu compte que la dernière fois j’avais omis ce détail et failli à mon hospitalité.
Nous restions debout, mais je pouvais sentir le plancher vibrer sous mes pieds, malmené par la tension qui envahissait mon homme en présence de cette ordure.
— Rends moi ma fille Javier, qu’on en finisse, éludait-il sa proposition de nous désaltérer.
— Bien entendu, mon ami, souriait-il faussement.
Il attrapa une pile de documents sur son bureau et les tendit à Toni.
— C’est quoi ça ? s’impatientait mon taureau en commençant à gratter le sol de son sabot.
— Ça, c’est le hic, marmonnais-je dans mes dents.
Toni se retourna sur moi, accusateur de n’avoir réussi à la mettre en veilleuse et approbateur qu’une nouvelle fois je sois dans le juste. Je soupirais en secouant la tête. Je pouvais lire dans son regard un « tu avais raison » dissimulé.
— Ne le prend pas comme ça, Toni, se réjouissait-il. Un service en vaut un autre, non ?
Il parcouru à toute vitesse les documents remis par Javier.
— La perte si soudaine d’un ami comme Hector a laissé un grand vide sur mon compte en banque. Tu finis son travail, et chacun reprendra sa route.
Je voyais Toni hésiter, mais avions-nous réellement le choix ? Jamais il ne nous aurait rendu notre fille si mon homme lui avait tourné le dos.
— Bien évidemment, la commission qu’il devait recevoir te sera entièrement octroyée.
À ma stupéfaction, il chercha mon approbation d’un coup d’œil. Il connaissait ma position quant à cet homme et ses agissements mais au risque de me répéter, avions-nous réellement le choix ?
— Je te soutiendrai quoi que tu décides, m’efforçais-je d’articuler à contre cœur.
— Ta femme peut rester ici avec sa fille, elle sera mon invitée pendant ton absence.
Mon homme se flanqua à rire convulsivement.
— Elle vient avec moi ! exigeait-il.
Il s’apprêtait à quitter le bateau mais il poussa un dernier rugissement.
— Et tu lui trouves des papiers ! Je t’appelle ce soir pour les modalités.
Il traversa le pont à toute vitesse, furibond, tandis que je le suivais au pas de course. J’étais dévastée et intriguée par ses nouvelles fonctions mais attendre qu’il se calme me semblait la seule option. J’avais ressenti le sol trembler, le tonnerre gronder telle une catastrophe naturelle dévaster tout sur son passage mais la sérénité dont il faisait preuve sur le chemin du retour me démunissait d’autant plus. J’osais à peine ouvrir la bouche et encore moins le fixer. Je concentrais mon attention sur le paysage défilant à toute vitesse du côté passager du véhicule.
Le visage collé à l’armature métallique du cadre de la voiture, j’adoptais inconsciemment une posture de détachement face à la situation. « Le calme avant la tempête », une expression qui prenait tout son sens à mes yeux en cet instant précis. Je me visualisais au pied d’un volcan en éruption et plus les minutes s’allongeaient sans entendre le son de sa voix, plus j’anticipais la puissance de l’explosion. « Il faut toujours se méfier des silences » avait un jour prononcé un célèbre
vulcanologue.
J’hésitais à notre arrivée à lui chiper les clefs de la bagnole et aller me poser sur une plage quelconque ou m’enfermer dans la chambre. Je ne cherchais pas à fuir mais à chérir un moment de solitude qui me faisait défaut dans ce trou miteux que nous retrouvions à contre cœur. Je m’isolais dans la salle de bain, prenant une douche de longue durée. Ma fille, je n’avais même pas pu l’entrevoir cinq minutes. Je me sentais dévastée, seule, sans personne auprès de qui trouver du réconfort. L’eau de ville jaillissant de la pomme de douche emportait sur son passage la rivière de mes larmes amères.
— Qu’allait-il à nouveau advenir de nous ? me questionnais-je désespérément sous le flot fumant des éclaboussures sur ma peau blafarde.
Cet endroit qui, la veille, était encore empreint de notre passion devenait un désert aride d’exil. Je cherchais une aide spirituelle dans les vapeurs qui emplissaient la pièce exigüe, sans en percevoir un infime signe. Sans les immerger, le bout de mes doigts ridés me fit comprendre le temps qui avait défilé sans que je ne m’en rendisse compte. À moitié essuyée, j’enfilais un pyjama attrapé au vol dans ma valise.

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